Le XXe siècle s’ouvre sur une déflagration artistique. Rien ne sera plus comme avant. Le fauvisme libère la couleur de la nature et fait surgir la peinture comme un spectacle incandescent. L’expressionnisme, venu d’Allemagne, donne forme à l’angoisse intérieure et au geste instinctif, portés par la puissance de la couleur. Le cubisme, mené par Picasso et Braque, fracture le monde visible, et le reconstruit à coups de plans, d’angles, de facettes miroitantes. Le futurisme, lui, célèbre la vitesse, la ville, le bruit, l’élan mécanique. Dans ce foisonnement, les artistes rompent avec la tradition, repoussent les limites de la figuration, inventent de nouveaux langages pour un monde en pleine mutation.

De ses premières peintures « fauves » exposées au Salon d’Automne de 1905, à son ultime phase artistique marquée par les papiers gouachés et découpés, Henri Matisse (1869-1954) reste un inlassable expérimentateur, sans cesse à la recherche de nouvelles solutions formelles, interrogeant la question de la représentation et du décoratif, le rapport entre la ligne et la couleur, entre la surface et le volume. Cette conférence reviendra sur l’oeuvre de Matisse, pilier de la peinture moderne, hymne à la lumière, à la simplicité et au « bonheur de vivre ».

Dépassant l’opposition traditionnelle entre figuration et abstraction, Nicolas de Staël (1914-1955) développe dans l’immédiate après-guerre une peinture qui lui est propre, privilégiant la matière, le geste, la forme et la révélation de l’espace. Sa passion des « grands ciels » et des paysages l’arrime au monde sensible et le pousse à travailler au contact direct de la nature. La conférence s’attachera à mettre en lumière cet artiste inclassable, au regard brûlant et perpétuellement en quête.

Au tournant du XXe siècle, une révolution silencieuse s’opère : l’art cesse peu à peu de représenter le monde extérieur pour entrer dans une autre dimension intérieure, spirituelle, parfois musicale. C’est une époque de quête : on cherche dans l’abstraction un langage universel, pur, capable d’élever l’âme autant que de structurer le chaos du monde. L’abstraction devient le terrain d’une nouvelle utopie visuelle : celle où le tableau ne montre rien, mais révèle tout.

Peintre, dessinatrice et graveuse française d’origine norvégienne, mariée à Hans Hartung, Anna-Eva Bergman (1909-1987) occupe une place de choix dans l’histoire des abstractions de la seconde moitié du XXe siècle. Tournée vers une écriture picturale minimaliste, alliant la simplicité des lignes, les aplats de couleurs et un usage fréquent de la feuille d’or et d’argent, elle a décliné un répertoire de formes archétypales inspirées de la nature et du cosmos. Ses oeuvres puissantes et singulières ont été présentées au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris au printemps 2023.

Né en Suisse au cours de la Première Guerre mondiale, le mouvement Dada a repensé à neuf la peinture, la poésie, la photographie ou le cinéma. Voulant faire table rase du passé, il n’a cessé de proclamer un principe de liberté absolue en art. Une liberté revendiquée par le surréalisme qui, sous l’égide d’André Breton, son fondateur en 1924, a placé la création sous l’égide du rêve, de l’imaginaire et de l’automatisme psychique. En décloisonnant les catégories traditionnelles de l’art, en inventant de nouveaux procédés de fabrication et en employant de nouveaux matériaux, Dada et le surréalisme ont renouvelé en profondeur tous les champs de la création et ont profondément irrigué l’inspiration artistique pendant des décennies, tel un concentré d’énergie, d’onirisme, de révolte et de subversion.

Après les ravages de la Seconde Guerre mondiale, l’art change de continent, d’échelle, de ton. New York devient le centre d’un nouveau monde artistique. Dans les grands formats de Pollock, l’artiste ne peint plus : il agit. Le geste devient spectacle, la surface un champ de bataille intérieur. Rothko, lui, invente des toiles silencieuses, méditatives, imprégnées de sacré. Mais bientôt, un autre tournant s’amorce : l’Amérique triomphante devient aussi celle des images, des objets, des marques. Warhol, Lichtenstein, Rauschenberg… les artistes du Pop Art puisent dans la culture de masse pour dire un monde saturé de signes et de marchandises. L’art devient miroir, parfois critique, parfois complice, de la société de consommation.

Marquées par des changements politiques et économiques majeurs, par une globalisation accrue et une révolution numérique décisive, les années 1990 ont ouvert la voie à une nouvelle ère du monde de l’art. Opérant une rupture qui dépasse les aspects purement stylistiques et esthétiques, l’art des années 1990 a instauré un nouveau rapport entre l’art et le réel, ses objets, ses images tout en déconstruisant la notion de modernité et en tentant de repenser un présent débarrassé des grands récits utopiques. La conférence propose de dresser le panorama artistique d’une décennie au cours de laquelle les artistes ont accéléré le décloisonnement des disciplines, pratiqué toutes sortes d’hybridations et réintroduit des points de vue oubliés par l’histoire : celui des minorités, celui des femmes, et celui des cultures extra-européennes.

Bien que leurs ambitions et leur champ d’application soient différents, l’art et la science s’enrichissent mutuellement depuis de nombreux siècles. Dès la Renaissance, la figure de l’artiste flirtait avec celle du savant-ingénieur, témoignant des tensions fécondes qui existent entre les deux disciplines : s’inscrivant dans une même démarche d’observation et d’expérimentation, l’une comme l’autre explorent de nouveaux territoires (physiques, mentaux) et transforment notre manière de voir, d’appréhender et de représenter le monde. La période actuelle favorise largement la rencontre entre artistes et chercheurs, ouvrant ainsi de nouvelles voies à la création, en lien avec les découvertes scientifiques et les technologies récentes.

Des grottes ornées de Lascaux jusqu’aux mouvements de l’Arte Povera et du Land Art émergeant dans les années 1960, les artistes n’ont cessé de créer d’après et avec la nature. A l’heure des défis environnementaux posés à notre société, de nombreux créateurs s’emparent aujourd’hui des questions liées à la protection de la biodiversité et à la transition climatique, et nous invitent à retisser un lien entre l’humain et la sphère du vivant, afin d’imaginer et de construire – face à la catastrophe annoncée – d’autres futurs possibles. Embarquons avec ces artistes, qui redéfinissent les paradigmes de la création, dans une perspective à la fois esthétique et éthique.